Deuxième syndicat de l'académie tous corps confondus.

Syndicat indépendant Académique et National

Le SIAES - SIES, LE syndicat indépendant !


15 mars 2021

 

C’est curieux, chez certains profs, ce besoin de faire des frasques !

Sale temps pour la liberté dans l’école de la République.

 

La « cancel culture » est arrivée ! Le nouveau variant américain du virus historique de la bonne vieille Inquisition sévit dans les établissements scolaires. Une police de la pensée cherche à assurer une emprise croissante sur la libre parole au sein même de l’école républicaine où l’on est censé enseigner tolérance, écoute et débat. Ah ! Le sens de l’Autre ! Combien de groupements de textes et de thèmes le célèbrent jusqu’à plus soif ! Mais quand l’Autre, c’est nous, tout change, curieusement.

Jean-Baptiste VERNEUIL, légitimement bouleversé par l’ignoble assassinat de notre collègue Samuel PATY (certains, visiblement, ne le sont plus), et pour avoir rappelé dans le dernier éditorial les principes républicains qui guident le SIAES - SIES, a essuyé des attaques violentes et pire, surtout dans le contexte actuel, des menaces.

 

Du fond de ma retraite, je tiens à l’assurer de mon amical soutien et de mon admiration pour son dévouement sans bornes. Je tiens aussi à exprimer mon indignation et mon inquiétude. « Semper ego auditor tantum ? » Car enfin, de quoi s’agit-il dans cet éditorial ? Rien moins que de rappeler trois principes qui nous sont chers :

- L’école de la République doit résister aux pressions croissantes de toute forme de communautarisme et de ségrégationnisme.

- L’autorité et l’indépendance des professeurs doivent être systématiquement défendues par une hiérarchie qui les laisse bien trop souvent livrés à eux-mêmes.

- L’école doit enseigner les valeurs de la République, c’est-à-dire des valeurs universelles.

On peut - et on doit - réagir à ces propos, on peut refuser le constat et contester les principes. On peut aussi en sourire de pitié et de condescendance, nous l’acceptons, nous en avons l’habitude. Mais que ce républicanisme sincère et qui, soit dit en passant, a valu récemment à Jean-Baptiste les honneurs du journal communiste « la Marseillaise », déchaîne la haine et les anathèmes, c’est à la fois incompréhensible et infâme (au sens où Voltaire parlait de « l’infâme »).

 

Nous voilà étiquetés de « fachos » ou accusés de faire le jeu du Rassemblement National. Dans l’échelle de Richter du néant de la pensée, cette accusation suprême prépare l’excommunication (Jean-Baptiste et le SIAES en ont fait les frais puisqu’ils ont été exclus de l’intersyndicale) et l’excommunication à son tour prépare et légitime toute forme de violence et d’éradication. Défigurer l’autre en le traitant de « facho » relève d’un authentique fascisme !

  

Mais qu’il me soit permis d’aller un peu plus avant dans l’analyse. Qui fait le jeu du RN ? Ce dernier doit son succès aux abandons et aux lâchetés de ceux qui ont choisi de ne plus parler de sujets cruciaux (immigration, laïcité, autorité etc.) au prétexte que les extrêmes les instrumentalisaient à leur façon. Agir ainsi, c’est mettre le RN au centre du jeu et en faire l’aune à partir de laquelle il faut décider de parler ou de se taire. Il devient le nouveau « point Godwin » de tout débat et le maître du refoulement collectif. Etrange aporie : ne parlons pas pour ne pas nourrir les extrêmes, mais nourrissons-les en nous taisant !

Osons ici aller un peu plus loin encore. C’est une certaine gauche (je dis bien « une certaine ») qui a pris l’écrasante responsabilité de déconstruire, avec les armes de l’ethnologie et de la sociologie, le principe d’universalité hérité des Lumières, mythe prétendument forgé par l’ordre bourgeois ethnocentriste et dominateur. Pourquoi pas ? Le seul problème, c’est que cette certaine gauche rejoignait ainsi au mot près la critique de l’universalisme lancée par les « anti Lumières » de la droite nationaliste, depuis Herder jusqu’à Maurras en passant par Taine et Chateaubriand. Voilà une belle « alliance objective » ! (le concept n’est pas de nous) puisque pour les uns et pour les autres, l’humanité se décline au pluriel.

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Mais, à lire et à relire cet éditorial, je suis toujours à la recherche du véritable objet du délit. Je crois que j’ai trouvé.

Jean-Baptiste ose y parler de « France » et surtout de « racines judéo-chrétiennes » (sans en faire l’apologie d’ailleurs). Horresco referens ! Ces mots (nauséabonds) agissent comme des stimuli réflexes provoquant des haut-le-cœur qui n’ont rien à envier aux nausées des Précieuses. Mais, au SIAES, nous n’avons pas leur ridicule, ni le talent de Molière pour trouver des périphrases acceptables.

Bien que ce ne soit ni le temps ni le lieu d’approfondir (ce n’est jamais, d’ailleurs, ni le temps ni le lieu !), mais lancé dans mon élan, j’ose proférer quatre énormités.

1- Le Christianisme, par la distinction structurante entre le temporel et le spirituel, a préparé, au moins théoriquement, l’avènement de la laïcité, même si l’Église, en s’appuyant sur la fameuse « donation de Constantin » qui était d’ailleurs un faux, a trahi ce principe.

2- La loi de 1905 a ainsi rendu le Christianisme à sa vocation première, Dieu devenant désormais le séparé. Pourquoi n’en serait-il pas ainsi pour toutes les religions, au nom de l’égalité et de l’universalité ?

3- La France n’a jamais connu de théocratie au sens strict, la monarchie de droit divin (dont je prends la précaution de préciser que je ne fais pas l’éloge, moi laïcard républicain) ayant été théorisée pour faire pièce au pouvoir de l’Église et assurer l’autonomie du politique qui s’affranchissait ainsi de la tutelle du Pape. Cela a été lumineusement montré dans l’ouvrage de Marcel GAUCHET, La religion dans la démocratie (1998).

4- Paul VALERY, dans un texte archi-connu (Variétés 1, 1924), a pensé l’Europe à venir sur les trois bases du droit écrit, de l’individu, de la rationalité, c’est-à-dire de Rome, du Christianisme, et de la Grèce. On a préféré la construire sur les marchés et sur la finance : c’est plus consensuel. Mais sans doute Valéry a-t-il préparé à titre posthume l’avènement du Rassemblement National et est-il temps d’envisager le déboulonnage de sa statue !

 

Bien entendu, ces propos n’engagent que moi et non le SIAES. Ne brûlez pas, SVP, notre petit journal jaune ! En plus, ce ne serait pas écologique.

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Vous l’aurez compris : certains collègues ont perdu leur boussole républicaine, mais ce n’est pas une raison (ou peut-être c’en est une) pour devenir haineux et violents. La nôtre, nous l’avons bien en main et nous persistons à croire naïvement dans la République, l’universalisme et la laïcité bien qu’il y ait loin des principes à la réalité (ferions-nous du syndicalisme si ça n’était pas le cas ?) ;

Ces principes, nous en sommes les témoins (les Grecs auraient dit les « marturoi »).

Merci, Jean-Baptiste, d’avoir pris le risque de le rappeler. Tu n’es pas seul dans ton combat.

 

 Marc LABIT - un des membres fondateurs du SIAES

 

Lisez l'article de mars 2021 : Refusons la soumission ! Bis repetita placent.

 

Lisez également l'éditorial du "Courrier du SIAES" n° 87 de décembre 2020 : Refusons la soumission ! Refusons la soumission des professeurs et de notre institution devant les élèves et les familles. Refusons la soumission de l’École Républicaine devant les communautarismes et les religions.

 

Hommage à Samuel Paty (15 octobre 2021).

 

SIAES et SIES : les syndicats garantis SANS écriture inclusive !

 

Encore un professeur agressé (article d'octobre 2021).

 

Quelques revendications du SIAES - SIES : Nous voulons être, et rester, des professeurs, et non devenir des animateurs socio-culturels.

 

"Courrier du SIAES" n° 88 de mars 2021

 

"Courrier du SIAES" n° 87 de décembre 2020

 

 


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